LES POSTES DE GARDE DE MEDECINE GENERALE A UN TOURNANT
NOUS NE SOMMES PAS NORMATIFS, MAIS STRUCTURANTS

Le GBO, syndicat majoritaire parmi les médecins généralistes francophones, dénonce depuis longtemps des dérives à dimension communautaire dans le subventionnement des postes de garde de médecine générale. Le budget devient trop étroit, et on pourrait vivement contester certains choix. La ministre de tutelle, Maggie De Block, reste sourde à des demandes de subsides liées à des spécificités wallonnes, comme le financement de l’ouverture des postes en soirée de semaine dans des zones qui manquent de généralistes.

Le GBO constate qu’aujourd’hui, c’est un mouvement collectif de protestation qui émane de l’ensemble des cercles wallons, après réception de la nouvelle convention que leur soumet l’INAMI. Lui-même redit toute la confiance qu’il place dans la formule du poste de garde, qui contribue à l’attrait de la profession et à la rétention des jeunes diplômés.

Le GBO n’a eu de cesse de tirer le signal d’alarme sous cette législature. Dans le dossier « garde en médecine générale » (et plus précisément postes de garde (PMG)), l’attitude dirigiste du cabinet De Block se révèle toxique. Elle déteint sur les façons de faire de l’INAMI, avec lequel les généralistes avaient pourtant toujours entretenu un dialogue constructif.

Du gel des budgets PMG par la ministre à la tenue d’un audit, des velléités d’imposer un modèle unique scotché à l’hôpital à la dernière politique en date de réseaux de postes desservant de grands clusters de population, les médecins généralistes auront vécu ces dernières années plus d’un rebondissement. Et auront subi cette volonté rémanente de l’équipe de Maggie De Block de (re)prendre la main, avec une écoute très relative des acteurs de terrain.

Le sentiment dominant en Belgique (francophone en tous cas), cinq bonnes années après le plan garde de Laurette Onkelinx, est celui de travail bien fait mais… mal reconnu, de budgets non revus, de demandes non rencontrées par la ministre de tutelle alors qu’elles touchent à des questions de santé publique, comme la préservation d’une médecine de proximité dans les milieux ruraux.

Le GBO n’a jamais été contre une harmonisation des dépenses publiques injectées dans les différents projets de PMG. Au contraire, il a toujours plaidé pour leur standardisation. Il sait pertinemment que l’enveloppe n’est pas extensible et qu’il faut l’utiliser au mieux pour le bien collectif, à l’échelle du pays. C’est-à-dire en répartissant équitablement les moyens pour permettre à un maximum de projets d’éclore et non pas en cédant aux attentes budgétaires déraisonnables de certains projets ou aux intérêts partisans.

Fantasmes que prétendre qu’il y a, ou y a eu, des attentes déraisonnables ?

Le GBO a encore en mémoire les pressions en faveur d’un nouveau projet, Brasschaat pour ne pas le citer, destiné à fleurir à… 6,5 km du PMG d’Anvers-Nord. Ou un plaidoyer sur la légitimité d’une dépense de 800 euros pour… une chaise ! Et que penser du dossier Terranova, structure néerlandophone implantée à Bruxelles, qui a hérité du quart du budget pour les postes de la capitale en assurant, en moyenne, un unique contact-patient par jour ?

Cela fait des années que le GBO redoute et prédit un glissement sud-nord dans l’affectation des moyens fédéraux pour réussir à couvrir en postes tout le pays. Et pour cause, le territoire wallon et sa population étaient déjà desservis à 80% quand Maggie De Block s’est attaquée à sa réforme des soins non programmables, tandis que le territoire flamand l’était à 45% seulement. La couverture du Sud du pays s’était faite en employant 40% du budget total, celle du Nord avec les autres 60%.

Aujourd’hui, ce n’est plus un seul syndicat mais l’ensemble des cercles wallons qui s’insurgent par la voix de la FAGw, la Fédération des associations de généralistes de Wallonie. Dans un communiqué détaillé, les cercles déplorent amèrement que les autorités puisent dans une enveloppe collective déjà étriquée pour éponger les dépassements flamands, et ce, sans l’ombre d’un débat sur la pertinence du trop-dépensé (lire en fin de communiqué).

Le GBO aurait souhaité voir des correctifs apportés pour préserver une équité communautaire. Il aurait pu s’agir, essentiellement, du financement de l’ouverture des postes les soirs de semaine pour les PMG wallons qui le demandent, parce qu’ils y voient un outil anti-pénibilité, une façon de ne pas aggraver la pénurie locale de confrères. Pendant que l’on validait les dépassements de plafonds de la part de PMG flamands vivant sur un grand pied, rien n’est venu. Aucune réponse à ces SOS francophones, sauf des promesses cycliques du cabinet, quand il sentait le mécontentement trop présent, de se pencher (sans tomber !) sur la question. Peut-être. Plus tard. Le timing de Maggie De Block – d’abord couvrir le pays (comprenez : la Flandre) de postes ouverts le week-end durant 4 ans et puis « on verra » – est inacceptable.

Dans certains coins de Wallonie, l’ouverture en semaine dépasse l’enjeu du maintien d’un service de garde. C’est ni plus ni moins l’implantation de nouveaux généralistes qui se joue, implantation espérée dans (au moins) 144 communes wallonnes pénuriques sur 262, où la population peine à se trouver un médecin traitant.

Le GBO est fermement convaincu que les autorités doivent continuer à soutenir, avec une attention redoublée pour l’équité, le déploiement des PMG. Il est persuadé de la valeur et de l’avenir de la formule.

Sur d’autres bancs syndicaux, on soutient que les généralistes devraient, en somme, « reprendre leur liberté » d’organiser la garde comme bon leur semble, à l’ancienne et sans poste – donc sans dépendance aux subsides de l’Etat, quitte à mettre la main à la poche pour s’offrir un fonctionnement autonome.

L’idée peut sembler séduisante. Le GBO trouve toutefois absolument inconcevable que les médecins doivent payer pour faire tourner un service à la collectivité qui leur est imposé.

Dans son soutien au déploiement des PMG, le GBO n’est pas normatif. Il est structurant et le revendique. Dépasser les réflexes individualistes, organiser collectivement la garde, voir par-delà les frontières d’un cercle et concevoir des solutions loco-régionales génératrices d’économies d’échelle, c’est dans l’intérêt des médecins d’aujourd’hui et de demain, et des citoyens.

Quoi qu’on en dise, le poste de garde est d’ailleurs la formule qu’apprécient – et recherchent ! – les généralistes de la nouvelle génération.

Pour reprendre une affirmation du SMG, un Syndicat français de la Médecine Générale, émise il y a 10 ans déjà, « là où il y a des difficultés dans l’exercice de la médecine générale, la solution passe par la reconquête de la dimension collective de l’exercice professionnel ».

Réaction de la Fédération des associations de généralistes de la Région wallonne (FAGw) à la suite des conventions 2019 pour les PMG.

Les cercles wallons, par le biais de la FAGw, viennent de faire connaître leur profonde indignation, par communiqué adressé à la presse spécialisée (*) à lire ici. Mi-février, ils en avaient alerté le président de la commission médico-mutualiste, Jo De Cock (Inami).

Cette indignation possède plusieurs causes entremêlées et a été attisée par la réception, fin janvier, des conventions 2019 pour PMG, expédiées (tard, sans négociation et avec des points nébuleux) par l’INAMI.

La solution retenue de financer 2018 et 2019 en prenant les dépenses réelles 2017 et en y ajoutant 2%, et encore 2 autres, va étrangler les PMG, prévient la FAGw. La marge de manœuvre est trop étroite pour absorber les alourdissements de dépenses imprévus comme les frais de remplacement de collaborateurs en arrêt maladie. En outre, les « bons élèves » de 2017, ceux qui s’étaient montrés mesurés dans les dépenses de fonctionnement, se trouvent pénalisés par le nouveau système.

La FAGw déplore explicitement ce qui a entrainé le changement de règles : l’enveloppe commune rétrécit, puisque elle sert à payer selon elle, des « dépassements majeurs des plafonds de la standardisation, demande du nord du pays bénéficiant surtout au nord du pays ».

La FAGw évoque une aggravation de l’écart existant entre le nord et le sud du pays sur deux ans : un million d’euros, en faveur de la Flandre. « Il faut arrêter d’avoir peur d’évoquer l’évident déséquilibre communautaire », dit-elle.

Les cercles wallons s’interrogent sur le bien-fondé de choix fréquents au nord du pays. Pendant qu’on reste sourd à certaines demandes wallonnes, l’outsourcing du transport des médecins de garde, par exemple, souvent appliqué par des postes flamands, n’est pas remis en question. Est-ce là, pourtant, l’option la moins onéreuse ?

(*) Communiqué de la FAGw, « Réaction à la suite des conventions 2019 pour les PMG »