Réunion de concertation du 03/09/25 avec le Ministre VDB : où en est-on sur cet avant-projet de Loi-cadre ?

Flash-info 52/25, publié le 10/09/2025

Comme nous vous en faisions part dans notre Flash-info Rentrée des classes : quid de la Loi-cadre ?, plusieurs réunions de concertation avec le Ministre Frank Vandenbroucke sont planifiées durant le mois septembre. Une première réunion s’est tenue le 03/09 au cabinet, réunissant les syndicats médicaux et le Ministre autour de la table de négociation.

Si nous ne pouvons que regretter que le GBO y soit, depuis le début des négociations, le seul représentant de la médecine générale francophone (non, le GBO n’y fait pas grève !), cette réunion nous a permis de soulever plusieurs points sensibles persistants dans la dernière version de la loi-cadre. Certains d’entre eux ont fait l’objet d’un débat constructif, tandis que d’autres ont été immédiatement rejetés. Vous trouverez ci-dessous un état des lieux des négociations en cours.

Suppléments d’honoraires

Si le principe de plafonner les suppléments d’honoraires est acquis, les pourcentages maximaux de 25 % (ambulatoire) et 125 % (hospitalisation) ont été supprimés du projet de loi et ce, grâce à la pression des syndicats (nous avions e.a. soumis plusieurs témoignages de nos membres – chiffres à l’appui – pour étayer notre refus face à ces pourcentages irréalistes) et des autres partis politiques de la coalition Arizona, alertés par le lobbying que nous avons mené en coulisses.

Les taux plafonnant les suppléments d’honoraires ne seront donc plus définis arbitrairement mais bien en concertation au sein de la médico-mut et sur base de données objectives fournies par les médecins et hôpitaux. Nous avons désormais jusqu’au 31/07/2027 pour présenter une proposition de pourcentages maximaux basée sur ces données.

La revendication de coupler cette mesure avec la révision de la nomenclature et la réforme du financement des hôpitaux est également acquise, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Les réformes de la nomenclature et des hôpitaux devront donc en principe être bouclées le 1 janvier 2028, date à laquelle le plafonnement des suppléments d’honoraires entrera en vigueur.

Lors de la concertation de cette semaine, il est apparu clairement que le maximum qui serait admis par le politique serait 175 %, ce qui est nettement plus acceptable au regard de 2 acquis cités plus haut. Nous mettrons donc tout en œuvre pour définir (de manière transparente et en nous basant sur des données objectives) des taux plafonnant de manière soutenable les suppléments d’honoraires, afin de ne pas mettre à mal l’innovation et l’esprit d’entreprise dans le secteur des soins de santé. Si nous réitérons notre attachement à un système le plus largement accessible à tous, même pour les soins les plus sophistiqués si nécessaire, nous réitérons également notre combat pour un financement correct de tout acte utile à la santé de nos concitoyens. Il est clair que la phono-consultation en fait partie et le GBO/Cartel s’attellera en outre, comme il l’a toujours fait, à une reconnaissance du rôle central de la médecine générale et un financement à la mesure de ses missions.

Suspension du numéro INAMI

Grâce à l’insistance du Cartel (et de l’ABSyM), la version actuelle du texte a évolué positivement puisque la suspension du numéro INAMI ne peut plus être prononcée par le Roi (ndlr : entendez, le Ministre) mais bien les Chambres de première instance et Chambres de recours instituées auprès du Service d’évaluation et de contrôle médicaux de l’INAMI (SECM). Il est également acquis dans cette version du texte qu’une telle suspension ne pourra être imposée par le SECM que comme alternative à l’amende administrative pour les infractions (1) supérieures à 35.000 €.

Toutefois, le texte actuel ne mentionne toujours pas que la suspension ne peut être demandée qu’en cas de récidive, et plus précisément en cas de non-paiement d’une amende administrative (antérieure). Or, ce sont précisément ces cas-là pour lesquels la SECM a toujours affirmé qu’une sanction alternative à l’amende était nécessaire. Il nous a été promis que cette question serait examinée plus en détail lors d’une réunion avec les juristes concernés et nous veillerons donc à ce que le texte soit formulé en ce sens, pour éviter toute interprétation partisane et assurer une sécurité juridique aux médecins.

Prime de pratique intégrée réservée aux généralistes conventionnés

L’intention du Ministre est de rendre la convention plus attractive pour les prestataires. Si l’intention est bonne, le GBO/Cartel estime que le moyen le plus logique d’atteindre cet objectif serait d’augmenter le montant du statut social de l’INAMI. Nous regrettons donc que le Ministre ait choisi de réserver la prime de pratique intégrée (PPI) de l’INAMI aux seuls médecins généralistes conventionnés.

Heureusement, nous avons déjà réussi à obtenir que ce lien avec le conventionnement ne s’applique pas aux primes visant à améliorer la qualité des soins prodigués comme la prime de l’accréditation. À cet égard, nous estimons que la PPI doit également être exclue de ce lien puisqu’elle aussi est liée à des critères de qualité, notamment l’utilisation des services e-santé utiles à la santé publique et à la gestion du système de soins. Les mutuelles et AADM n’étant pas d’accord sur ce point, le Ministre a renvoyé la balle à la concertation en médico-mut et nous espérons que nous parviendrons à rallier tout le monde à notre position.

Imposition de tarifs maximaux par le Roi

Dans l’hypothèse où aucun nouvel accord médico-mut ne serait conclu dans les temps, le texte prévoit actuellement un mécanisme automatique par lequel des tarifs maximaux sont imposés par le Roi.

Nous estimons que ce mécanisme automatique va au-delà de la possibilité d’imposer des tarifs maximaux prévue par la loi actuelle et veillerons à ce que ce point soit clarifié lors de la prochaine réunion avec les juristes des deux parties.

Détermination du budget pour l’élaboration d’un accord médico-mutualiste

Le processus de détermination du budget de l’INAMI est entièrement redéfini dans la loi-cadre. Pour simplifier, cela revient à dire que tout le pouvoir revient d’une part à la Commission pour les objectifs de soins de santé (COSS) et, d’autre part, au Conseil des ministres (et au Ministre Vandenbroucke en particulier) sous la forme d’une lettre de mission.

Malgré l’opposition de l’ensemble du Comité de l’Assurance (réunissant tous les prestataires de soins et mutuelles), ce point n’a pas été modifié par rapport à la première version du texte. Le cabinet affirme que ce sont principalement les partenaires gouvernementaux qui refusent d’y apporter des modifications. C’est sans doute vrai en ce qui concerne la détermination du montant du budget, mais nous doutons que ces partis se préoccupent de la manière dont ce budget sera utilisé une fois son montant fixé.

Nous appelons donc nos partenaires au sein du Comité de l’Assurance à continuer à faire bloc pour que le texte actuel sur le processus budgétaire soit révisé. Nous redoutons en effet qu’après la mise en œuvre des projets transversaux (dont la réelle utilité en santé publique doit être démontrée), il ne reste plus grand-chose pour parvenir à un accord satisfaisant.

Tri en salle d’urgence et au poste de garde

Le Ministre a réaffirmé sa volonté d’organiser un tri efficace avant tout contact médical en garde pour limiter le recours inapproprié aux services de garde hospitaliers et de médecine générale.

Le GBO/Cartel insiste sur plusieurs mesures concomitantes à mettre en place :

  • établir une collaboration entre hôpitaux et services de médecine générale pour éviter le « ping-pong » entre eux.
  • revoir le financement des salles d’urgence qui aujourd’hui les empêche de référer les cas de médecine générale vers le PMG. La soutenabilité des services d’urgence exige l’organisation de soins réellement finançables sans être dépendant de soins non-appropriés.
  • établir un tri contraignant et performant médicalement: le ministre envisage de déléguer le tri aux PMG si les engagements du ministère de l’intérieur pour le 1733 ne sont pas suffisants. Certains PMG ou groupes de PMG organisent déjà eux-mêmes un tri avec succès. Cela soulève les questions suivantes : à quelles conditions financières ? Avec quels protocoles ? Avec quelles responsabilités médico-légales ? Comment éviter les incohérences de tri entre les hôpitaux et les PMG ?
  • revoir spécifiquement l’organisation de la nuit profonde (23h-8h).
    • Des accords spécifiques de collaboration doivent être établis entre hôpitaux et MG.
    • Le tri doit se professionnaliser pour sécuriser médicalement les appels N7 (qui doivent être vus endéans les 12 heures) et ne pas obliger le réveil inutile du médecin de garde. C’est donc un médecin ou un infirmier spécialisé engagé par l’État qui doit assurer ce tri pour détecter les cas N7 qui devraient être vus plus rapidement. Ceci vaut pour toute heure du jour et de la nuit.
    • La médecine générale doit s’organiser pour recevoir les cas N7 dans le délai exigé : création de centres de soins non programmés ? Réservation de plages préfinancées pour soins aigus du jour chez les généralistes (exemple français) ?
  • organiser une grande campagne d’information par les mutuelles et les organisations de patients pour conscientiser les patients à la bonne utilisation des services de garde.

Téléconsultations

Le ministre envisage la restauration de la téléconsultation en garde sans toucher un mot concernant la phono-consultation en semaine pendant les heures ouvrables. Le GBO/Cartel insiste :

  • Le concept des téléconsultations en garde doit être vu en dehors des critères officiels des phono-consultations lors d’un lien thérapeutique déjà établi. Ces téléconsultations de garde s’apparentent plutôt aux consultations de triage. Il importe de leur envisager un code spécifique et d’urgence (soirée, WE et jour férié, nuit).
  • Pour les phono-consultations pendant les heures ouvrables, nous rappelons l’absolue nécessité de les restaurer, puisqu’elles sont un instrument indispensable d’accessibilité aux soins et de diminution de charge écologique. Une augmentation de 1 euro du ticket modérateur des consultations (moins donc que son indexation simple) pour les patients non-BIM pourrait libérer un budget suffisant pour les valoriser correctement et les réintroduire au service des patients. Nous acceptons l’idée d’une limitation de leur nombre/an selon des critères à convenir collégialement.

Et maintenant ?

Même s’il existe déjà un accord global au sein du gouvernement sur la loi-cadre, il reste encore une certaine marge de manœuvre. Comme vous pourrez le contacter à la lecture la lettre que nous avons envoyée au Ministre le lendemain de cette réunion du 3 septembre (où nous résumons les points sensibles soulevés en réunion), le Cartel (ASGB – GBO – MoDeS) continuera à insister sur les points mentionnés plus haut lors de la prochaine réunion de concertation avec le Ministre Vandenbroucke, ainsi que lors des réunions prévues avec les juristes des deux parties.

Notez que le GBO/Cartel a également réalisé une analyse critique de la lettre de mission gouvernementale, analyse qui servira de gouvernail à ses représentants dans les négociations à venir.

(1) Il s’agit des infractions prévues à l’article 73bis, 1° à 4°, de la Loi SSI.

Art. 73 bis .

Sans préjudice d’éventuelles poursuites pénales et/ou disciplinaires et nonobstant les dispositions des conventions ou des accords visés au Titre III, il est interdit aux dispensateurs de soins et assimilés, sous peine des mesures énoncées à l’article 142, §1er:

1° de rédiger, faire rédiger, délivrer ou faire délivrer des documents réglementaires visés dans la présente loi ou ses arrêtés d’exécution lorsque les prestations n’ont pas été effectuées ou fournies;

2° de rédiger, faire rédiger, délivrer ou faire délivrer les documents réglementaires précités lorsque les prestations ne satisfont pas aux conditions prévues dans la présente loi, ses arrêtés d’exécution ou les conventions ou accords conclus en vertu de cette même loi;

3° de rédiger, faire rédiger, délivrer ou faire délivrer les documents réglementaires précités lorsque les prestations effectuées ne sont ni curatives ni préventives au sens de l’article 34;

4° d’exécuter des prestations visées à l’article 34, superflues ou inutilement onéreuses au sens de l’article 73;

5° de prescrire des prestations visées à l’article 34, superflues ou inutilement onéreuses au sens de l’article 73;

6° de prescrire des spécialités pharmaceutiques visées à l’article 35bis, §10, alinéa 2, en dépassant les seuils fixés par les indicateurs et en respectant insuffisamment les recommandations visées à l’article 73, §2, alinéa 2;

7° de commettre, après avertissement écrit par un des fonctionnaires visés à l’article 146, des manquements relatifs aux formalités strictement administratives qui ne mettent pas en cause les conditions essentielles de remboursement des prestations;

8° d’inciter les dispensateurs de soins à la prescription ou à l’exécution des prestations superflues ou inutilement onéreuses.